***Si vous suivez l'émission la Galère, mais que vous n'avez pas encore visionné l'émission du 25 octobre 2010, je vous suggère d'attendre de voir l'émission avant de lire ce texte, car il dévoile certains éléments de l'intrigue***
On évalue qu'environ 1 femme sur 3 et 1 homme sur 6 sera victime d'agression sexuelle au cours de sa vie.
Le tiers des femmes et le sixième des hommes, c'est énorme. Certaines personnes choisissent d'en parler et d'autres garderont ce terrible secret. Pourquoi? Parce que dans la majorité des cas, les personnes qui ont agressé sexuellement une autre personne auront commencé par construire un climat de confiance avec l'autre personne. Puis ensuite, après l'agression, viendra la manipulation, le chantage et le contrôle: "C'est de ta faute; t'as vu comment tu es habillé(e)?", "T'as pas dit non; tu voulais", "Personne ne va te croire; qui crois-tu que les gens croiront entre toi et moi? Tu n'es rien", "Tu vas briser la famille si tu parles; c'est notre secret", etc...
Dans l'épisode de "La Galère" du 25 octobre 2010, nous assistons à une formidable scène où un agresseur continue de dominer sa victime même des années après l'agression: l'argent et la notoriété sont ses principaux arguments: "Qui croirait que je t'ai violé? J'appuie financièrement ta campagne politique!" Et aussi, l'argument souvent utilisé "Tu es monté dans ma voiture; tu me voulais. Et en plus, tu n'as pas dit non".
Sachez que jamais au grand jamais, "ne rien dire" correspond à un consentement. Jamais. JA-MAIS. Non seulement je vous le dis, mais les tribunaux ont statué à cet effet depuis de nombreuses années. En fait, il n'appartient pas à une personne de refuser d'avoir des relations sexuelles, mais bien à nous de nous assurer du consentement de notre partenaire. Vous avez donc la responsabilité de vérifier que la personne avec qui vous vous apprêtez à avoir des relations sexuelles souhaite réellement avoir des relations sexuelles avec vous. Si vous ne le faites pas, c'est vous qui êtes dans l'erreur; pas la personne qui a figé et qui n'a pas été capable de dire non pour toute sorte de raison (peur, humiliation, soumission, etc).
Pour revenir à l'épisode de la Galère, ce qui est assommant, c'est de voir l'attitude de domination que continue à avoir la personne agresseur même des années après; tenter d'acheter sa victime, jouer "le bon gars"en public, venir harceler la personne à son domicile, continuer de faire des menaces à propos de sa réputation, etc.
C'est très souvent ce à quoi sont confrontées les victimes d'agression sexuelle. Les victimes d'agression sexuelle (et de violence conjugale) se font agresser en privé et devront bien souvent se défendre en public (entourage, cours, etc) d'êtres les victimes et non les coupables de cette agression.
C'est une des raisons pour lesquelles l'agression sexuelle est le crime le moins déclaré à la police (9% seulement sont déclarés selon les évaluations de la police en 2008).
Si une personne que vous connaissez vous dit avoir été victime d'agression sexuelle, prenez le temps de l'écouter, de lui dire que vous la croyez et tenter de l'épauler comme elle en a besoin. Parfois, ça passe par l'écoute, d'autres fois, ça passe par un accompagnement dans un processus judiciaire. Surtout, évitez de remettre en question ses dires "T'es sûr que c'est ce qui est arrivé? As-tu fais quelque chose pour que ça arrive/que ça n'arrive pas?". Cette attitude risque davantage de briser le lien de confiance que vous avez avec cette personne et ça renforcera toutes les menaces que l'agresseur lui avait dites, notamment, que personne ne la croirait!
Si vous avez été vous-même victime d'agression sexuelle, il existe des ressources pour vous écouter et vous aider si vous le souhaitez.
Pour les personnes résidant dans la région métropolitaine de Montréal, appelez au 514-933-9007
Pour les personnes ailleurs au Québec, appelez au 1-888-933-9007 (ligne sans frais)
Pour de l'information en ligne: www.agressionsexuelle.gouv.qc.ca
N'oubliez jamais; vous auriez pu courir nu(e) dans la rue en criant "J'ai vraiment envie d'avoir des relations sexuelles!", ça n'autorise personne à vous toucher dans un contexte érotique et sexuel sans que vous ayez consenti librement et de façon éclairée à ces rapprochements.
Sophie Morin, Sexologue-Consultante
8 Commentaires
Je ne dis pas qu'il ne faille pas dénoncer, au contraire. Mais il faut que la personne qui dénonce soit prête à le faire pour que cette dénonciation soit libératrice et non dévastatrice plus que l'agression sexuelle ne l'a été.
Il faut que cette personne soit bien entourée et, bien souvent, qu'une partie de l'accompagnement psychologique ait été entamée.
Et dans le cas de l'émission, la situation est encore plus vraie, car comme les deux personnalités sont publiques, tout le monde s'en mêlera, il y aura des lignes ouvertes sur le sujet, du genre "Qui dit vrai" et les journaux en parleront énormément!
Malheureusement, les victimes sont celles qui doivent se défendre, ce qui est ironique...
Mais je reste d'accord avec vous sur le fond; si personne ne dénonce les agressions, ça minimise les impacts qu'ont les agressions sexuelles et encourage les personnes à poser des gestes d'agression sexuelle, car elles ne voient pas les conséquences!
Il arrive souvent que des personnes en état d'ébriété nous confient des choses; l'alcool est un déshinibiteur et on compte souvent sur les effets de l'alcool pour que les gens oublient notre confidence.
Mais vous avez raison de vous inquiéter de ce que votre ami vous a confié; si cette personne vous en a parlé, c'est qu'elle vit encore aujourd'hui des impacts de ces épisodes d'agression sexuelle.
Plusieurs victimes vivent des émotions négatives face à ces agressions; elles ont souvent honte et ont souvent le sentiment qu'elles sont responsables (en partie ou en totalité) de ces agressions. Il s'agit d'une des raisons de leur silence.
J'en ai aussi parlé dans un précédent post (http://www.sophiesexologue.com/2010/06/plaisir-et-agression-sexuelle.html) ; le corps de certaines personnes a parfois réagi lors des agressions sexuelles; la réponse sexuelle s'est déclenchée (érection du pénis et du clitoris, lubrification vaginale et parfois même orgasme). Cette réponse sexuelle, due à la stimulation physique du corps contribue souvent à la honte et au sentiment de culpabilité de certaines personnes. Ce n'est pas le cas pour toutes les personnes victimes d'agression sexuelle, mais je prends le temps de le nommer, car c'est un élément tabou en lien avec l'agression sexuelle.
(suite plus bas...)
Bref, pour revenir à votre question, l'important est de respecter le rythme de la personne et de rester centré sur ses besoins à elle: est-ce que cette personne est prête aujourd'hui à recevoir de l'aide.
Car il ne faut pas l'oublier; aller chercher de l'aide, c'est rouvrir cette boîte de pandore, parler de ces épisodes d'agression sexuelle. Parfois les personnes ne sont pas prêtes à faire ce travail tout de suite.
Par contre, il peut être pertinent que cette personne sache qu'il existe de l'aide pour elle.
Dépendamment de votre sentiment d'aisance à aborder verbalement le sujet ou non avec la personne, plusieurs solutions s'offrent à vous:
1- Lorsque vous serez seuls, dans un contexte de discussion, vous pourriez lui nommer que vous vous souvenez de la confidence qu'elle vous a faite (elle dans le sens de "la personne"). Vous pouvez lui dire que ce qu'elle a vécue vous touche et que vous la croyez (important de lui dire que vous croyez ce qu'elle a dit).
Si vous vous sentez à l'aise, vous pouvez lui nommer que si elle a besoin de parler, vous serez à l'écoute.
Par contre, respectez vos limites; si vous n'êtes pas à l'aise, vous pouvez lui nommer "Écoute, je ne sais pas trop quoi te dire ou faire qui pourrait t'aider... si je peux faire quoi que ce soit, dis-le moi. Mais je vais rester là et je vais rester ami avec toi, peu importe ce que tu as vécu".
2- Si vous n'êtes pas à l'aise de nommer ces choses verbalement, vous pourriez faire la même chose par le biais d'un courriel.
3- Peu importe si vous choisissez la 1ere ou la 2e option, vous pourriez indiquer à cette personne des ressources d'aide qui existent:
a) la ligne d'information sur les agressions sexuelles nommée plus haut
b)Le CSSS (ancien CLSC) du quartier
c) Si la personne habite la région Métropolitaine de Montréal, il existe l'organisme CRIPHASE qui se spécialise dans l'intervention auprès des hommes ayant été abusés sexuellement durant leur enfance (J'ai bien compris qu'il s'agissait d'un homme votre ami?). Si la personne habite à l'extérieur de Montréal, l'organisme CRIPHASE pourra peut-être donner des références ailleurs au Québec. http://criphase.org/
Finalement, il se peut que cette personne vous écoute (ou vous lise) et choisisse de ne rien faire. Vous devrez respecter sa décision et son choix. Faire quelque chose contre sa volonté, c'est remettre la personne dans une situation où son "non" n'est pas respecté ni entendu, comme au moment où elle a été victime d'agression sexuelle et que des adultes ont commis des gestes contre sa volonté.
L'important, c'est que vous lui avez dit que vous avez entendu, que vous la croyez et qu'il existe des ressources si cette personne souhaite entamer des démarches.
Peut-être que ces démarches débuteront demain, peut-être dans deux ans, peut-être jamais, mais le message que vous lui aurez livré peut-être très important, car être crû, c'est le premier pas vers une démarche de guérison.
Bonne chance!
Ce que vous me décrivez comme relation de départ, c'est une relation où il y avait un consentement mutuel entre deux personnes adultes. La honte que peut ressentir une personne par rapport à sa relation (à cause de l'adultère) est une chose, mais elle n'efface pas le consentement libre et éclairé.
Pour moi cette situation ne franchit pas une mince frontière.
La scène de la galère nous présente clairement une agression sexuelle d'un homme qui passe largement au-delà du consentement, car non seulement il ne s'assure pas de vérifier si la femme consent, mais il passe par-dessus le refus de la femme à avoir des relations sexuelles.
Que des contacts sexuels aient lieu dans une voiture n'a rien à avoir avec le consentement; plein de relations consensuelles ont lieu dans une voiture à chaque jour! Mais dans la scène qui nous concerne dans l'épisode de la Galère, il n'y avait pas de consentement. On peut regretter certains épisodes de notre vie (y compris des contacts sexuels), mais ça ne signifie pas qu'on n'y avait pas consenti.
Maintenant que la distinction a été faite en ce qui concerne le consentement, la situation que vous me décrivez comporte plutôt du harcèlement.
Qu'une personne soit en couple ou non et choisisse de mettre fin à une relation extra-conjugale est accessoire dans la situation que vous décrivez. Si une personne choisit de mettre fin à une relation et que l'autre personne refuse de respecter sa décision en poursuivant l'autre personne physiquement, par des coups de téléphone et des courriels, c'est du harcèlement.
Plusieurs séparations se font difficilement et de façon non consensuelle, car une des deux personnes souhaiterait rester dans cette relation. Par contre, à partir du moment où une des deux personnes souhaite mettre fin à la relation, ça peut être difficile, mais aller contre la volonté de cette personne est du harcèlement.
Qu'une personne soit obligée de changer ses habitudes de vie, car une personne la suit et la pourchasse, c'est carrément une agression.
Je comprends bien que cette personne qui harcèle souffre probablement de la séparation (beaucoup même), mais le processus de deuil doit s'enclencher, c'est-à-dire accepter que cette relation soit terminée.
La situation que vous décrivez arrive trop souvent, que ce soit dans des relations de couples banales qui se terminent ou dans des histoires extra-conjugales.
Ce qui est dommage dans les fins comme celles-là, c'est qu'elles effacent souvent tous les bons souvenirs de la relation pour ne garder en tête que le harcèlement et les sentiments négatifs.
Joëlle Morin, candidate à la maîtrise en sexologie a publié un texte dans le magazine "Ça sex'prime" sur la rupture. Il s'agit d'un texte qui vise à faire de la sensibilisation auprès des adolescents, mais qui, selon moi, éclairera de nombreux adultes! :-)
http://publications.msss.gouv.qc.ca/acrobat/f/documentation/2009/09-314-02F.pdf
Cette personne m'a demandé de retirer ses propos du blogue, mais j'ai tout de même souhaité laisser les distinctions que j'avais faites sur plusieurs concepts.
Merci!